Vieillir #17 Je ne suis pas une maman calme

En ce moment, enfin depuis une grosse année je dirais, je me sens un peu nulle en mère. Non pas que j’ai vraiment changé, même objectivement je suis obligée de d’admettre, que je m’améliore plutôt. Ce qui a changé, c’est mes sources de documentions sur l’éducation: les réseaux sociaux, les podcasts etc. J’y ai appris beaucoup c’est vrai. Mais j’y ai perdu un peu aussi…Je vous explique?

J’ai toujours assumé ma maternité approximative et intuitive (j’y avais d’ailleurs consacré un article). J’ai toujours eu conscience de ne pas être parfaite, mais je savais que je faisais de mon mieux et que c’était déjà très bien. En gros rien n’a changé, sauf que souvent désormais j’ai l’impression que mon mieux ce n’est plus assez.

Dans la vraie vie, je vois bien que les mamans elles sont grosso modo comme moi. Elles s’énervent, elles motivent leurs mioches à coup de barre de céréales, et répète dix mille fois les même phrases, ce qui les rend dingues évidemment. Mais sur les réseaux, sur Internet, j’ai l’impression que toutes les mamans, parlent doucement, proposent à leur enfant de décharger leurs émotions sans se sentir agresser, n’usent ni de chantage ni de stratagèmes qui ne seraient pas bienveillants et positifs.

Je sais que tout ça c’est des biais de perception. Mais je sais aussi que si c’est pas la stricte vérité, il y a des vérités dans ces partages. Déjà commençons par en rétablir une, de vérités. J’ai l’impression que certaines d’entre vous me voient comme ça. Comme un maman calme qui susurre au lieu de parler, qui passe toute son énergie à consacrer des temps de qualité à ses enfants… Non pas parce que je me montre ainsi mais parce que c’est la normalité des comptes de mamans sur Instagram. Donc déjà sachez que non, je ne suis pas une maman qui susurre.

D’autre part, cette image de mamans calmes que me véhicule internet me fait autant de mal que de bien. Le côté négatif, c’est tout simple: cela me fait me sentir nulle alors que je m’étais promis craché de ne jamais tomber dans les injonctions de maternité parfaite. J’essaie de garder le recul nécessaire, mais purée, que c’est dur parfois. Ces podcasts sur les neuro sciences, sur l’attachement, la confiance, c’est passionnant, mais hop il n’y a qu’un mini pas pour que ça devienne culpabilisant.

Le côté positif c’est que c’est hyper e riche de s’informer sur l’enfance, c’est intéressant. En plus, de comprendre des choses sur mes enfants, je ré-ecris mon histoire et j’analyse plein de choses de mon propre passé.

Et c’est peut être là le point le plus intéressant de cet article. J’en suis arrivée à une conclusion vachement intelligente: Nous sommes toutes différentes. Vous vous attendiez peut être à mieux, mais bon il y a des grandes vérités comme ça, qui méritent d’être bien comprises.

Ce que je veux dire c’est qu’il y a un leurre dans la maternité: celui de penser commencer une page blanche, une histoire composée avec un soi du présent et un enfant neuf. C’est faux. On part toutes d’un point bien diffèrent. Et ce n’est pas seulement une question d’origines géographiques ou de milieu social c’est encore plus complexe que ça.

On démarre toutes sa maternité avec des certitudes et des reflexes, des normalités et des doutes. On se traine toutes un gros sac à dos. Dans le mien j’ai compris qu’il y avait plein de trucs trop lourds. Il y a les souvenirs d’une famille bruyante, où il faut parler plus fort pour se faire attendre, il y a de la violence ordinaire et de l’humiliation, il y a des secrets familiaux et des attentes limitées. Il y aussi les fous-rires, les joyeuses chamailleries avec ma sœurs, les discussions sans tabous et la liberté. C’est passionnant de vider ce gros sac à dos et de comprendre que je ne peux pas être une maman qui susurre, juste parce que c’est trop difficile pour moi. De constater qu’il y a plein de violence et beaucoup que je m’inflige à moi-même.

Oui c’est triste, mais j’ai compris que mes mômes, dans leurs sacs à dos à eux il y aura mes propres casseroles (et celles de leur père aussi), il y aura nos erreurs y compris certaines qui fragilisent, il y aura même des lourdeurs et des limites qui ne m’appartiennent pas mais qu’on se transmet inconsciemment de génération en génération et c’est come ça.

Je sais aussi qu’il y aura des trucs chouettes dans leurs bagages, des choses que les autres n’ont pas forcement, la créativité, la curiosité, les réponses sans tabous, un certain grain de folie et une envie de changer le monde.

Je suis convaincue que l’éducation bienveillante et positive n’est intéressante qu’à une seule condition: si on adopte cette posture à soi-même, à l’enfant qu’on a été certes, mais surtout à l’adulte qu’on est devenu. J’apprends chaque jour à être bienveillante auprès de mes enfants, à accepter leurs colères et leurs imperfections alors que ce n’est pas naturel ni inné pour moi. Et à long terme ça ne pourra fonctionner que si je m’impose cette bienveillance.

Alors non, je ne suis pas une maman calme. Je suis une maman qui parle et rigole fort. Je suis une maman qui a plein de mauvais reflexes et qui n’a jamais appris la patience. Je suis une maman qui pense trop et qui impose une exigence à tous ceux que j’aime. Je suis une maman très empathique mais avec peu de clés pour dénouer les angoisses. Je suis comme ça aujourd’hui mais j’avance tous les jours, car on peut tous changer. J’apprends auprès de mes enfants qui sont eux même uniques et imparfaits.

Ils pourront me faire plein de reproches que j’accepterai en courbant le dos, mais ils ne pourront jamais me reprocher de ne pas être authentique ou sincère, ni de ne pas leur témoigner tout mon amour.

C’est probablement pas assez, mais c’est déjà ça de pris.

40 réflexions au sujet de « Vieillir #17 Je ne suis pas une maman calme »

  1. Ooooooh wow ! Quel post ! Je commente rarement mais là je ne peux m’en empêcher !
    J’en ai les larmes aux yeux tellement cela me parle !
    Je suis issue d’une famille méditerranéenne (comme dirait-on, qui a le sang chaud, qui parle fort, qui se chamaille pour un oui, pour un non, bref, avec un sacré lot de casseroles, comme dans toutes les familles) et je me bats contre mes automatismes au quotidien. Je culpabilise, souvent, et puis parfois comme toi je prends du recul, et je me dis qu’après tout, je leur donne tout ce que je peux leur donner. & j’essaie de m’améliorer. C’est à mon sens déjà une belle valeur que d’essayer de mieux faire.
    Merci pour ce billet.

    1. Ah je reconnais bien le côté méditerranéen. Effectivement cet héritage culturel latin est très présent pour moi

  2. Merci !
    Petite ça m’étonnait toujours les familles où ils ne criaient jamais (en vrai ça n’existe pas, mais je devais tomber aux bons moments).
    Je m’en veux d’être une Maman qui explose parfois, qui a besoin de claquer les portes quand elle est énervée et qui râle beaucoup. En fait je m’en veux surtout de ne pas avoir effectivement réussi à me sortir de ça. Alors je fais aussi de mon mieux.

    1. mais on va peut être arriver un jour à se détacher de ces mécanismes… ou pas.
      Après ce que je me force à faire (alors que ce n’est pas naturel non plus) c’est à revenir sur les moments où je me suis énervée, les débriefer et s’il faut m’excuser, et je me rends compte que ça a énormément de sens pour les enfants.

  3. Maman, un humain parfaitement imparfait. Normal quoi ! Il faut accepter ce fait et faire avec. Le principal donner le l’amour et de l’attention à ceux qui nous sont proches. Ne pas se comparer puisque chaque être humain est unique. Ne pas trop intellectualiser, faire avec son ressenti, et l’avenir nous dira « peut-être » si cela a été réussi. (J’avais un maman imparfaite qui avait plein de problèmes qui m’ont été handicapants mais à la maturité je l’ai comprise et pardonné). J’espère que mes enfants se construiront le mieux possible avec ce qu’ils auront reçu de moi, sachant qu’avant tout je les aime.

  4. Oh la la quel article ! Il me parle tellement.
    Être maman, ce n’est pas inné, mais une construction de chaque jour. Une construction qui ne finira jamais. Une construction qui dépend de tellement de paramètres : nos enfants tous différents, leurs besoins, notre histoire, notre vécu, nos épreuves de vie, nos croyances et nos sensibilités.
    Nous culpabilisons toutes de ne pas être celle que l’on aimerait être.
    Ta conclusion dit tout, elle est à se répéter en boucle lorsque la culpabilité est présente.

  5. Nous sommes parfaitement imparfaites mais nous faisons au mieux avec notre amour de maman et nos casseroles de jeune fille.
    Merci pour ton article

  6. Comme cet article me parle… Moi aussi je me dis d’arrêter de passer autant de temps sur les réseaux car il faut le dire, souvent on se sent toute petite et parfois même pire au vue de toutes ces mamans qui renvoient une image parfaite… Je suis moi aussi une maman qui rêve de bienveillance et d’harmonie mais soyons honnête le quotidien reviens vite grignoter toutes nos bonnes intentions et la culpabilité derrière est bien là mais voilà, comme tu le dis si bien, la perfection n’est pas de ce monde, soyons indulgents envers nous mêmes, être maman c’est le plus beau métier du monde mais pour lequel il n’existe aucune formation ! Merci pour tes mots!

  7. « C’est probablement pas assez, mais c’est déjà ça de pris. »
    Cette petite phrase résume bien toute la culpabilité des parents…
    Comme tu l’as écrit soyons bienveillant aussi avec nous, tu n’es pas parfaite et finalement es ce que c’est grave?
    Moi je vois surtout à travers le blog et les réseaux sociaux, une maman qui aime ses enfants qui leur fait découvrir plein de chose et qui leur inculque des valeurs. Et au final c’est surtout ça qui fera de eux des adultes épanouie.

  8. Bel article dans lequel je ne me reconnais que trop …! ( les larmes aux yeux comme Soizic) Mon chéri me fait souvent ce reproche que je crie trop , lui a grandi dans une famille calme et silencieuse a priori… difficile de changer ses réflexes qui remontent a l enfance , ca fait du bien de ne pas se sentir seule a lutter et a faire de son mieux avec ses imperfections et son grain de folie ! Encore merci pour ce partage et les photos sont magnifiques !

  9. C’est le drame d’internet je crois. C’est en effet un biais, positif et négatif et comparaison n’est pas raison…
    Chaque famille porte ses forces et ses faiblesses. On tente de compenser , corriger ce qui nous a blessé, mais que sait on des reproches que ne manqueront pas de nous faire nos enfants ? Il n’y a pas de famille parfaite, on fait au mieux avec ce que nous sommes et ce qu’ils sont.
    S’éloigner des réseaux virtuels et se reancrer dans le réel, avec les amis, l’entourage , ou une aide psychologique si on en ressent le besoin, c’est le meilleur cadeau qu’on puisse se faire à soi même, nous autres, êtres imparfaits par définition. Et la perfection n’est pas un cadeau que nous ferions a nos enfants, avoir des parents parfaits, bonjour l’angoisse et la pression.

    1. Exactement, si les parents sont parfaits, l’enfant ne pourra pas essayer de faire mieux en grandissant, il pourra juste essayer d’être à la hauteur de ses parents. Quelle pression de malade on collerait aux enfants dont on veut le bonheur !!
      Alors vive la tolérance envers nous même !

  10. Mon homme m’a dit un jour, il faut qu’instagram soit une source d’inspiration mais pas de culpabilisation ou d’idealisation. J’essaie de faire le tri depuis mais me fais encore avoir à mes dépens. Merci pour ce bout de vérité qui, avouons le, fais du bien aussi.

  11. Merciiii!
    Ça raisonne fort en moi, surtout en ce moment.
    J’ai le même sentiment vis à vis des réseaux sociaux, j’ai découvert Instagram pendant le 1er confinement et y ai trouvé de l’inspiration. Mais depuis quelques mois j’ai l’impression que tous le monde fait tout mieux que moi (sûrement pb de perception).
    La maternité pour moi fut pleine de surprise je croyais être armée, je suis tombée de heut, et plus les années passent plus je vois que même mes parents (que j’idealisaient) ont leurs failles.
    Mon mari dit souvent « avant on avait des principes maintenant on a des enfants ».
    Un enfant à particularité bouscule (encore plus) nos habitudes, se heurte à nos limites, met en évidence nos faiblesses, et c’est pas facile tous les jours.
    J’ai souvent peur, j’angoisse même, de leur créer des traumatismes. Pourtant c’est vrai on fait de notre mieux mais je trouve toujours que ce n’est pas assez.
    Je n’avais jamais vraiment envisagé ça sous cet angle et c’est pourtant si évident : nous sommes tous différents, nous sommes « bons » sur certains points et « moins bons » sur d’autres… Je vais essayer de me consacrer la dessus !

  12. Merci, merci, merci, merci, d’être aussi franche avec nous. C’est vrai moi aussi je vous imaginais calme et douce. Mais vous l’êtes en vérité, pas de la façon dont vous voudriez l’être mais la façon dont vous vivez est douce et calme, elle apporte beaucoup à vos enfants j’en suis sûre. Vous dites que vous n’êtes pas patiente mais vous cuisinez très souvent avec vos enfants, et seules les mamans qui cuisinent avec leurs enfants savent ! Donc vous êtes patiente. Il y a peut-être des familles plus calmes, mais sûrement pas plus aimantes, et qu’ y a t il de plus important que d’aimer ses enfants même si ce n’est pas de façon parfaite ! On peut toujours s’améliorer. Vous avez de belles qualités, vous êtes une très belle personne. J’aime votre blog et votre compte Instagram car ils ne surjouent pas. Merci Deborah.

    1. Merci pour votre commentaire qui m’a mis la larme à l’œil. Effectivement je crois que je suis patiente et calme… mais pas tout le temps et pas comme je l’imagine. Mais ça fait du bien de l’admettre en fait

  13. Moi aussi ton article me parle ! Je suis calme et je murmure pourtant (!) mais du coup je peux parfois me sentir transparente, personne ne m’écoute et ça me blesse … et puis une fois en colère, je deviens un volcan … il y a vraiment un deuil à faire à propos de la mère qu’on imaginait être et la vraie ! et comme tu dis, commencer par être bienveillant envers soi-même…

    1. Je suis comme toi, calme et patiente mais lorsque mes limites sont franchies et que j’ai trop encaissé je peux avoir une réaction disproportionnée. La goutte d’eau qui fait déborder le vase…

    2. C’est fort ce que tu dis sur cette impression de transparence…
      Et oui il y a un deuil à faire, et certains jours c’est plus douloureux

  14. Super article, qui fait beaucoup de bien à lire ! C’est une belle vision de la maternité (de la parentalité), bien plus légère à porter et bien plus sensée que celle qu’on nous sert partout. Merci !

  15. Merci pour cet article et ta sincérité. J’aime beaucoup te suivre. Tu es une super maman et tout ce que tu transmets à tes enfants est déjà énorme. On voit tout l’amour que tu leur porte à travers ton instagram ou ton blog et tu es une grande source d’inspiration. Je crois que la clé est la bienveillance envers nous-mêmes. Comme tu le dis on est tous différents et il y a autant de mamans différentes que d’enfants différents. Et c’est ça la vie, c’est l’humain, on a des émotions, des bagages, on est des être imparfaits et nos enfants le savent bien. On fait du mieux que l’on peut et je pense qu’on leur apprend autant de choses aussi grâce à nos imperfections. Je suis une maman calme, patiente, dans le dialogue, dans l’empathie, à l’écoute des émotions, au début j’étais à fond dans l’éducation positive « en conscience »… parce que c’est la maternité qui correspond le plus à ma personnalité, c’était plus facile pour moi. Je n’ai pas d’autorité naturelle, c’est très difficile pour moi de m’affirmer, j’évite toujours le conflit, ce n’est pas naturel pour moi d’élever la voix et lorsque je le fais quand je suis à bout, on ne me prend pas au sérieux, c’est too much et ça fait rire plus qu’autre chose et je me vexe… A contrario, mon mari est méditerranéen, il fait preuve de plus de fermeté, il est direct. Ce qui au début pouvait être source de conflit entre nous car pas la même approche, difficulté d’allier l’autre de son côté est aujourd’hui quelque chose qu’on a accepté, je pense que nos différences apportent un équilibre et que c’est très bien ainsi. On est d’accord, sur les règles, sur les principes, sur nos valeurs. Nos différences sont dans nos réactions, quand papa va s’énerver, se fâcher maman va répéter les règles et expliquer pourquoi et responsabiliser. Je ne crois pas qu’il y ait une éducation type qui peut s’appliquer à tous. Je crois que les besoins différent selon chaque enfant et qu’il ne faut pas non plus oublier les besoins des parents. C’est un équilibre à trouver. Il faut prendre soin de soi pour prendre soin des autres. Et heureusement qu’on est pas tous pareils, tous calmes, ce serait trop lisse, ennuyeux, les enfants vont être confrontés toutes leurs vies à des tempéraments, des personnalités autres que la leur. Je crois que la famille sert à ça aussi à apprendre les liens sociaux.

  16. Quel post putiiii !!!
    Je m’y retrouve à 10 000%, toujours partagée entre culpabilité et perfection ou tout au moins perfection de la maternité. J’ai beau me dire fu** å ces diktats sociétaux de la mère parfaite mais en y étant confrontée chaque jour , le.boomerang est violent parfois.
    Et puis oui nos casseroles de l’enfance…..tu m’en diras tant !!!
    En tout cas MERCI pour ce post pour le coup déculpabilisant ( nous qui ce week-end avons laissé nos 2 filles regarder la tv plus que de raison….et alors??🤫)
    Bise Auvergnate

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