Ne vous fiez pas au titre volontairement provocateur. C’est d’ailleurs plutôt le contraire, je voudrais vous parler des pères compétents, investis, mais qui subissent toujours une place assez précaire.
Je vous explique? Cette idée d’article m’est venu après une discussion avec Tiphaine, où clairement on se plaignait de nos mecs en disant que c’était toujours nous, qui nous libérions pour les sorties scolaires. Oui c’est le cas, j’ai du faire une dizaine de sorties scolaires, atelier parents/ enfants à l’école, ma préférence étant bien sur l’accompagnement à la piscine. Le papa n’est allé que deux fois à l’école, les deux fois pour jouer de la musique, donc, en plus, quelque chose qu’il aime. Mais rapidement après ma complainte de mère aigrie, je me suis rendue compte que les pères en général sont largement minoritaires dans toute la sphère scolaire. Et qu’aujourd’hui encore, on dit « l’heure des mamans », « est ce que ta maman pourra faire un gâteau? » « Ta maman va venir à la piscine? »… D’ailleurs vous avez remarqué que lorsque l’enfant est malade, les enseignants appellent systématiquement la mère?
Et puis, cela ne se cantonne pas à l’école, il y aussi tout le pan médical où on présuppose toujours que c’est la mère qui gère le calendrier vaccinal, la prise de médicament, les rendez-vous médicaux. Et surtout les jours enfants malades qui sont presque réservés aux femmes…
En réalité, en terme d’implication éducative on imagine toujours le père en retrait. Par exemple, à une réunion de famille, un bébé sent mauvais de la couche, dans 100% des cas on va le mettre dans les bras de sa mère pour qu’elle aille le changer.
Sans compter les milliards de phrases plus ou moins anodines « qui garde les enfants quand tu es en déplacement? », « ton mari t’aide? », « la nuit il entend rien de tourte façon, il a le sommeil trop lourd! », « les pères ils n’ont pas de patience pour les devoirs », « à la maison, j’ai trois enfants (ce qui compte le père) », « le paternage ce n’est pas très viril »(je me rends compte que mon correcteur d’orthographe ne connait pas le mot paternage d’ailleurs). Je pense qu’on peut allonger la liste à l’infini. Que montrent ces lieux communs? Que la femme est compétente avec les enfants (et plus largement dans l’univers de l’intérieur) et que le père ne l’est pas. Il y a même un pensée presque biologique derrière cela, l’homme ne porte pas l’enfant, il ne porte donc pas les ressources de son éducation. A l’inverse de la femme qui se doit, elle, de savoir. C’est autant révoltant d’un côté que de l’autre.
Récemment en écoutant le podcast Yesss, j’ai eu connaissance de ce compte tweeter, qui expose des actes d’incompétences paternels dans le domaine médical. Au départ, je dois bien avouer ça m’a fait sourire, et puis je me suis dit « oulala il ne faudrait pas que Jérôme (mon amoureux) tombe sur ce compte ça le mettrait carrément en colère ». Imaginez un peu le même compte avec des femmes: des petites anecdotes de dérapages, ou d’incompétences maternelles, exposés publiquement, qui laisseraient à penser que toutes les femmes sont comme ça… On criait au scandale n’est ce pas? Et encore ce ne serait pas équivalent, il faudrait choisir un champ où on préjuge une infériorité de la femme, par exemple un compte qui recenserait les incivilités et les accidents routiers causés par des femmes qu’on appellerait « femme au volant, mort au tournant »! On s’insurgerait, n’est ce pas? Je comprends le concept de dénoncer l’inégalité de la charge parentale et ça je suis pour. Mais pointer du doigts les incompétences des pères ce n’est pas très pédagogique. Les pères concernés vont se sentir coupables et la culpabilité, c’est tout de même l’ennemi numéro un à l’épanouissement et les autres vont se sentir très vexés. Pour tout vous dire, moi je trouve ça sexiste. Est ce que ce compte permet aux hommes de changer, d’assumer leur paternité? Evidemment que non!
Je sais que parfois c’est le cas, que les pères sont désinvestis, désintéressés ou même absents… Mais je me demande si c’est, cet état de fait qui est à l’origine des à priori ou bien l’inverse.
Les pensées paternalistes enferment les femmes dans un champ beaucoup trop réduit de leurs compétences, et inhibent souvent leurs ambitions professionnelles. Elles culpabilisent la mère qui ne sait pas, qui se trompe, qui ne ressent pas ce fameux instinct maternelle, et la montrent volontiers du doigts. Elles sont responsables de la charge mentale, et de l’épuisement des mères. Mais ces pensées desservent également les pères, qui doivent lutter pour faire valoir leur place et leur compétence. Ces pères qui doivent avancer sur un fil entre masculinité et paternité comme si les deux s’opposaient. Ces pères auxquels chaque jour on répète que l’épanouissement est hors du foyer, que quoiqu’ils fassent ils ne seront pas à la hauteur des mères.
Je me suis déjà plusieurs fois, que je n’aimerais pas être un père. Et finalement cette pensée suffit à montrer qu’il y a une trop grande discrimination à l’égard des pères. Je pense que si on souhaite l’égalité, si on souhaite que les postes important soient occupés à moitié par des femmes, il faut qu’au plan familial les pères puissent occuper la moitié de l’espace également. Je crois très fort dans les systèmes qui offrent un long congés paternité, car l’enfant devient alors une affaire de couple. Et cela, dans le domaine privée, et publique, car la femme n’est plus la seule à abandonner son poste. Pour moi, la place des pères est une lutte hautement féministe, car tant que l’équité n’existera pas dans la famille, elle ne pourra pas exister dans la société.
On termine cet article pavé, un peu décousu par notre vision personnel de la chose. Je ne suis pas certaine de pouvoir affirmer que nous sommes à l’équité de terme de charge éducative, en témoigne le nombre de sorties scolaires, mais aussi le nombre de mercredi à la maison. Mais je dois avouer qu’on ne doit pas en être trop loin (comprenez qu’il nous reste plus de boulot sur les corvées domestiques). Sachez, par exemple que chez nous tout ce qui est médical est du ressort du père, c’est lui qui donne les médicaments, et surtout toujours lui qui prend des jours enfants malades. Les enfants sont d’ailleurs tous sur sa carte vitale, contrairement à moi où il m’en manque un. Ils sont tous sous sa mutuelle d’entreprise et c’est lui qui gère toute la paperasse autour de cela également.
Bon après, il m’avait vendu le côté papa poule avant même que je sois enceinte en me réclamant à corps perdu un premier enfant, donc je savais où je mettais les pieds. Il a toujours été très à l’aise dans ce rôle là, même et surtout avec les petits bébés. C’est lui qui a fait les trois premiers bains, il a changé des couches le premier jour de vie, pris un mois de congés à chaque naissance. Il se lève la nuit, console, câline, dispute… Il se trompe aussi, mais le risque à prendre lorsqu’on s’investit. Il prend systématiquement des heures pour les rentrées scolaires. Il aime passer du temps avec ses enfants, il n’a jamais peur de les trimbaler à droite à gauche, d’ailleurs je suis toujours un peu jalouse de constater que lorsque je ne suis pas là, ils se sont fait une super sortie ski de fond, ou sont allés dans un musée. Il passe aussi des moments privilégiés avec chacun d’entre eux. C’est parfois lui qui tranche sur les décisions éducatives, et il a souvent raison (enfin dans la même proportion que moi), il s’interroge sur sa façon d’être père et cherche à faire au mieux. C’est chouette, mais profondément normal dans notre famille. Et d’ailleurs ce devrait tout simplement être la normalité. Les pères ont le droit de s’épanouir dans leur paternité et pouvoir exposer leur bonheur d’être père. Cela n’atteint en rien leur virilité ou leurs compétences professionnels. Et je crois qu’il est largement temps qu’on leur accorde pleinement ce droit.
Et le titre fait écho au Mythe de la mère hystérique, un ancien article que vous vous devez de lire de ce pas.
Monsieur Papa va chez la pédiatre ce soir. C’est tout sauf un exploit et encore heureux !
On sait avec qui on partage sa vie, on connait son profil, ça limite les mauvaises surprises quand on devient parent.
Oui c’est certain on choisi le futur père de son enfant
A chaque fois que je lis tes articles je me dis que je devrais reprendre mes florilèges de la blogo pour t’y mettre dedans !
Je lirai ce billet fleuve à monsieur ce soir, ça lui fera du bien je pense.
(oui oui c’est pas un comm’ très construit mais bébé nous ayant réveillés une douzaine de fois cette nuit j’ai le cerveau en compote)
C’est parfait comme commentaire 🙂
Je pense que le père a aussi la place que la mère lui laisse… Certaines femmes ont tendance à s’accaparer les enfants et jugent que le père, parce qu’il fait différemment, ne fait pas bien… Et quand on reproche systématiquement à quelqu’un de ne pas bien faire et bien ensuite, il ne fait plus du tout !
Tout à fait d’accord, il faut savoir accepter que les choses ne soient pas faites comme on les auraient faites…mais vois que l’essentiel c’est qu’elles soient faites !!
Oui mais est-ce que ce n’est pas encore rejeter la faute sur la femme ? Ne faudrait il pas donner l’envie et la légitimité aux hommes de prendre la place ?
Habitant la campagne, où l’on fait souvent « taxi » pour les activités sportives ou artistiques, le papa m’a toujours « déchargée » au maximum, n’a jamais raté un match, un concert ou une rencontre et il y a pris beaucoup de plaisir, de fierté.
Nous n’avons jamais rien comptabilisé et le partage s’est fait naturellement, se rendre disponible quand l’autre ne l’est pas ou l’est moins est une évidence pour nous et quand c’était possible nous y étions ensemble bien sur !
Idem pour les RV médicaux
Aujourd’hui nos enfants sont grands (21 et 19 ans) mais c’est toujours le cas, ils appellent aussi bien leur père que moi
Il faut aussi savoir déléguer (ce n’est pas donné à toutes les mamans de laisser de la place au père) surtout au tout début …
Je suis d’accord avec toi, il ne faut pas chercher à comptabiliser.. c’est plus source de tension qu’autre chose
Ton analyse est très juste, mais au fond je crois qu’il y a aussi quelque chose de profond qui vient des femmes elles-mêmes… Même si nous sommes un peu malgré-Nous enfermées dans le schéma que tu décris, nous avons aussi notre rôle a y jouer. Beaucoup de femmes se plaignent des petites erreurs de leurs compagnons, parce qu’implicitement ça les valorise… Quelque part, ça nous renforce dans notre rôle de mère, ça nous rassure et nous légitime en renforçant notre confiance en nous (au moins en théorie!). On a naturellement un peu tendance à croire qu’on fait mieux qu’eux, alors que ce n’est pas toujours le cas et que parfois on ne leur laisse pas tellement le choix de s’améliorer ou d’exprimer leur propre façon de faire les choses. C’est aussi à nous parfois d’apprendre à lâcher un peu prise!
C’est humain aussi de chercher à se rassurer. C’est aussi un chemin à parcourir dans le couple, devenir vraiment partenaire d’éducation.
Quelle jolie ode à ton chéri, à ce papa en or. <3
Tu ouvres ici une réflexion si importante !
Oui il est heureux
Je trouve encore une fois ton article très juste et suis très en phase avec toi sur ce sujet !
Depuis quelques temps je dois travailler certains samedis et je n’aime pas ça mais je dois reconnaître que ça a un avantage : ma fille passe du temps seule avec son père et ils adorent ça tous les deux !
Une chose qui fait grincer les dents de mon chéri c’est… sa mère qui pense toujours que c’est moi qui gère seule tout ce qui concerne notre fIlle ! Dernièrement elle est venue passer quelques jours avec nous et quand je suis partie travailler le samedi, elle me demande comment il faut l’habiller, ce qu’il faut lui donner à manger… j’étais hyper étonnée et je lui dis que mon chéri reste à la maison et toute étonnée à son tour elle me dit : « mais il saura ? »
J’en suis restée sciée et mon chéri un peu furax !
Depuis, on a beau redire et reexpliquer qu’on s’occupe tous les deux (et autant l’un que l’autre !) de notre fille et de notre maison en général, c’est systématique ma belle mère se tourne toujours vers moi pour me demander ! Et elle a toujours un oeil très critique sur son fils et sa façon de faire avec notre fIlle. On a vraiment l’impression qu’elle ne considère pas son fils capable de s’occuper de sa propre fille.
Dur de faire changer les mentalités !
Exactement pareil pour ma belle-mère. Dès que je m’absente elle demande à son fils s’il faut qu’elle garde les enfants, qu’elle prépare à manger… ça le rend dingue
Je suis complètement d’accord le père n’est pas assez valorisé pourtant autour de moi je vois beaucoup de père investi dans la vie de leur enfant. A la sortie de l’école il y a autant voir plus de papa que de maman.
Mon mari ne supporte pas quand on lui demande si il m’aide (car niveau ménage il en fait plus que moi). Et pour les enfants c’est pareil il a gardé notre grand le mercredi pendant 3ans et maintenant il garde le petit tout seul tout les vendredi. Et c’est normal en tout cas autant que si c’était moi.
Même si les stéréotypes ont la vie dure, les choses changent et c’est tant mieux !
Oui, effectivement il y a de plus en plus de pères investis qui prennent du plaisir dans la paternité.. mais il y a encore beaucoup de chemin à faire je trouve
Très bel article ! mon mari est ravi ! c’est un père investi…il est toujours estomaqué quand des ami(e)s le félicite pour son rôle et son investissement auprès des enfants ! pour lui c’est normal ! je crois que vraiment l’éducation de nos enfants fera la différence ! mon fils est très sensibilisé à la cause féminine mais se sent un peu agressé par le mouvement féministe et les discours à la télé…Il n’a que 12 ans. Il se rend bien compte que les choses ne sont pas en faveur des femmes mais comme il ne vit pas ça chez nous, c’est un peu difficile parfois. Bref, on va vers du mieux et c’est tant mieux !!!!!!!!!!!!!
Ah merci pour cet article! Je suis totalement d’accord avec toi, sur toute la ligne. ça me scandalise tout ce sexisme du côté des hommes comme du côté des femmes. Il y a encore tant de choses à faire!
Pour ma part, mon mari s’occupait plus de mon fils que moi. Maintenant on arrive à partager.
Il fait toutes les sorties scolaires, garde notre enfant pendant les maladies et toutes les vacances scolaires (je prends tout de même 6 semaines par an). Il le ramène de l’école et gère les devoirs la semaine. Il fait à manger, le linge (je m’y mets aussi), le ménage (on a pris une aide ménagère maintenant). Il fait tout autant que moi, voir plus.
Après, je suis chef d’entreprise dans le bâtiment. Je gère beaucoup d’hommes à la fois employés et clients et collaborateurs. Les rôles semblent inversés. ça fait bizarre de dire ça. Il ne devrait pas y en avoir.
De mon côté, j’aimerais avoir plus de temps avec mon fils. C’est pourquoi j’ai choisi de ne plus le mettre à la cantine et de faire l’activité piscine ensemble. On a trouvé notre équilibre. Ah! Et je suis parent délégué aussi, ça compte 😉
Le compagnon d une amie s est vu refusé une journée enfant malade car il n était pas une femme…. Ça en dit long sur le regard de la société sur la place de chacun….
C’est tellement important ce que tu dis sur le fait que la place des pères est une lutte féministe ! Pas seulement parce que ça permettrait aux femmes de reprendre le travail plus tôt ou ce genre de choses et de ne plus les cantonner à la maison mais surtout parce que sexisme et misogynie ne sont pas des synonymes ! Le sexisme touche aussi les hommes (genre « bah non, fait pas de patinage artistique, c’est un truc de filles ! ») et que donc, si le féminisme vise à combattre le sexisme et à déconstruire le genre, alors il faut aussi se battre pour les pères, et pour les hommes en général. Malheureusement, beaucoup de féministes (ou du moins celles que l’on entend le plus) ne le voient pas comme ça…
Quant à savoir qui de l’œuf ou la poule, si c’est les hommes incompétent qui a envoyé les femmes à la maison, ou le cliché qui a retenu des hommes de prendre leur rôle de père plus à bras le corps, je dirais que c’est un cycle sans fin, un cercle vicieux. Par exemple, une copine en école de médecine m’expliquait qu’un de ses profs leur avait dit qu’il fallait laisser jouer les enfants garçons avec des poupons, pour que ça permette plus tard qu’ils aient envie de s’occuper de leur enfant, et que ça développe leur instinct paternel, mais on ne laisse pas jouer les garçons avec de faux bébés parce que « c’est un jouet de fille ». Ceci tend plutôt à dire que si les pères ne prennent pas leur place, ou moins, c’est à cause de l’éducation.
Merci Deb pour ce post parce que j’ai eu exactement la même réaction en écoutant cette partie du podcast !
Je me suis dit « oui mais en même temps c’est souvent la mère qui emmène pour la première fois le bébé chez le médecin parce que c’est elle qui a un congé maternité qui dépasse 11 jours…donc c’est souvent elle qui fait les premiers vaccins… » pour moi c’est la clé un congé paternel et maternel égal en terme de temps ! Voila qui donnerait véritablement un coup de pied dans le système patriarcale et donnerait l’occasion aux pères de tisser du lien dès les premiers instants de vie !